Le geste d’accompagnement: « Être-avec-l’autre »

Je suis avec toi. Je suis tout à côté de toi. Je peux te tenir la main si tu le souhaites. Je t’accompagne sur ta route. Je choisis de t’accompagner sur ta route. Ton chemin. Un chemin qui est en grande partie derrière toi, et que toi seul a su tracer au fil de ta vie. Je connais peu de chose de ce chemin que tu as parcouru. Probablement que j’en resterai toujours à ce faible niveau de connaissance de toi puisque tu es l’unique témoin de l’ensemble de ta vie. Malgré le fait que je connaisse peu de chose de toi, je me sais – et je me sens – capable d’être présent à cette partie de ta vie actuelle. Cette partie-ci de ta vie si importante.

Il ne m’est pas essentiel de tout connaître de toi pour être là à tes côtés. De plus, je demeure respectueux de ce que j’ignore de toi. Je sais qu’il y a beaucoup de grandeur dans ce que tu vis présentement. Une grandeur qui me dépasse même. Malgré cela, je sais que je peux être à ton écoute. Je peux être dans mes limites, un témoin, un compagnon à qui tu peux te dire, t’exprimer dans le but d’alléger un peu de ta souffrance. Par ma présence et mon écoute, je désire te permettre d’être encore plus près de toi, plus présent, plus à l’écoute de toi-même.

Peut-être est-ce la première fois pour toi que tu te permets d’aller dans cette zone de ta vie ? Peut-être est-ce la première fois de toute ton existence que tu te permets d’être à ton écoute, d’être présent à toi-même avec autant d’attention ?

Cette présence à « toute ta vie » me confronte à ma propre vie. Je peux te soutenir dans cette quête que dans la mesure où je peux me confronter moi-même à ma propre vie; dans la mesure où je peux être présent à mon propre passé; à ma propre souffrance. Je ne peux te cacher que tes peurs appellent mes peurs. Tes désirs éveillent mes désirs. Tes espoirs illuminent mes espoirs. Tes besoins interrogent mes besoins.

Je ne peux être avec toi qu’à travers ma présence à moi-même. Je ne peux être présent à toi qu’à travers ma propre vie. Ma propre histoire. Pendant un temps, j’ai été enfant tout comme toi. Mon regard sur la vie, ma compréhension de celle-ci s’est faite en grande partie à travers cet enfant que j’ai été. D’une certaine façon, je le suis encore. Par moment, j’ai encore ce regard sur ma vie « adulte » à travers cet enfant que j’ai été. C’est à travers lui que je peux, là aussi, te rejoindre dans tes propres souvenirs, tes propres blessures d’enfance, tes propres souffrances avec lesquelles tu as grandi. C’est en étant présent à cet enfant que j’ai été que je peux être à l’écoute et à la défense de l’enfant que tu as été. Peut-être que pour la première fois, tu te donnes le droit – l’occasion plutôt – d’être en contact avec l’enfant que tu as été et ce, à travers cette vulnérabilité de ton existence ? Ta vulnérabilité actuelle peut te rappeler d’une certaine façon, celle-là même où tu t’es retrouvé dans le passé en présence de tes parents, dépendant d’eux, de leur soin, de leur attention. Je ne peux ignorer que cette réalité peut se rejouer de nouveau, ici, dans ta vie. Reconnaissant ainsi cette éventualité, je suis encore plus près de toi.

Je suis présent à toi. Je suis plus préoccupé par ta vie que par ta mort, même si je sais que tu es mourant. Je désire t’accompagner dans cette ultime étape afin que tu puisses franchir avec le plus de quiétude et de sérénité possible ta mort en prenant appui sur ta vie.